Où le métissage ouvre de nouvelles perspectives au laran
14. ESPRITS FRÈRES
d’Elisabeth Waters
Mon cher Papa,
Le mariage de Cassilda avec Edric Ridenow a eu lieu hier, de sorte qu’elle est maintenant Dame Serrais, ce qui me paraît tout drôle – car pour moi, elle n’est toujours que ma grande sœur. C’est vraiment dommage que tu n’aies pas pu venir avec Maman pour la noce, mais Coryn t’a admirablement représenté, et j’étais là, avec Donal, pour soutenir et encourager Cassilda. Elle était vraiment nerveuse avant la cérémonie, mais elle a l’air assez heureuse ce matin.
Coryn et moi, nous resterons ici jusqu’au printemps, parce que mon laran s’est finalement éveillé (j’avais l’impression que ça n’arriverait jamais, mais maintenant, je crois que c’est en bonne voie), et Auster, qui est venu d’Arilinn pour le mariage, dit que je ne devrais pas voyager tant que j’ai la maladie du seuil. Mais ne t’inquiète pas ; je ne suis pas assez malade pour que ma vie soit en danger – je n’ai que des nausées épouvantables, c’est tout.
Je sais que vous vous êtes inquiétés, toi et Maman, du genre de laran qui se manifesterait chez moi, alors je m’empresse de vous rassurer : le mien ne sera pas aussi incommode que celui de mes frères ou de ma sœur. Même moi, je me rappelle comme les faucons suivaient partout Cassilda, quand son rapport avec eux s’est développé. Ils étaient terriblement mal vus de Maman (sans parler des serviteurs) jusqu’à ce que Cassilda apprenne enfin à contrôler leur propension naturelle à se percher sur le métier à broder de Maman. Et personne n’oubliera le rapport de Donal avec les loups – surtout leur façon de hurler chaque fois qu’il avait un accès de la maladie du seuil. Au moins, le rapport de Coryn avec les chevaux étaient comparativement plus calme, et même utile, même si tu as dû agrandir les écuries cette année-là.
Moi aussi, j’ai développé un rapport avec les animaux, bien sûr, mais les animaux en question sont petits, silencieux, et ne me suivront pas partout dans la maison. Comme tu le sais sans doute, Lerrys Ridenow a voyagé dans tout l’Empire, et il a rapporté un grand nombre de petits poissons des mers tropicales de Terra. J’ai développé un rapport avec eux, et Lerrys m’en a donné cinq cents pour cadeau du solstice d’hiver, ce qui est vraiment gentil de sa part. Avec cette lettre, Donal t’apportera les plans des aquariums indispensables pour les accueillir. La plupart pourront tenir dans le réservoir de huit cents litres, mais il en faudra un séparé pour les tétrodons, ; les anostomus sont trop agressifs pour vivre avec aucune autre espèce ; et les cichlidés vont même jusqu’à se tuer entre eux. Mais je crois que, si nous les mettons à part dans le réservoir de trois cents litres, je pourrai les persuader de vivre en bonne intelligence.
Coryn et moi, nous apporterons les cailloux, les filtres et le système de chauffage à notre retour, et Auster a très gentiment proposé d’emprunter l’aérocar d’Arilinn pour transporter les poissons chez nous dès qu’il fera assez chaud (les poissons meurent dans une eau plus froide que les eaux tropicales de Terra – c’est pourquoi il faut que les aquariums soient chauffés). Les réservoirs devraient tenir le long du mur de ma chambre qui n’a ni portes ni fenêtres, mais il faudra sans doute installer le système de chauffage sous le lit.
J’espère que vous avez passé une bonne fête du solstice d’hiver, toi et Maman, et je vous reverrai au printemps.
Ta fille affectionnée,
Arielle MacAran